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Projet App'ee pour le retour à l'emploi : retour sur 3 apprentissages sur la facilitation



En juin 2020, je vous parlais du lancement du projet App'ee, par lequel je préparais une certification à la facilitation. Après 6 mois d'apprentissage théorique, nous passions à la partie pratique avec l'accompagnement en binôme de 6 personnes en recherche d'emploi. Nous étions là pour les faire progresser sur les compétences les plus recherchées aujourd'hui par les entreprises, qui permettent d’être agile dans un contexte incertain et d’apprendre à apprendre, les 5 C : Collaboration, Communication, Créativité, Pensée Critique et Alignement Corps Esprit. Les membres de notre groupe avaient exprimé à l'époque un besoin additionnel, que j'ai nommé le 6ème C : retrouver la Confiance en soi. Le tout dans l'optique de se remettre en action et en activité, que ce soit trouver un emploi, démarrer une formation ou encore créer son entreprise.


A raison d'une 20aine de rendez-vous bimensuels, cette expérience nous a toutes transformées, elles comme moi. Ma posture de facilitatrice et d'accompagnatrice, dans la transition professionnelle mais aussi écologique, a beaucoup évolué en un an. Je vous livre aujourd'hui un bilan de fin de parcours, avec 3 apprentissages personnels sur la facilitation.


1er apprentissage : Faire confiance au processus et le pouvoir des petits pas



L'approche de l'accompagnement App'ee est assez libre. Mais il y a une chose qu'il a été choisi de ritualiser : les petits pas. A la fin de chaque séance, les membres de notre groupe partageaient un petit pas, engagement pris devant les autres pour avancer dans leurs projets respectifs. Et nous revenions systématiquement sur les petits pas de tout le monde en début de séance suivante


L'idée derrière la méthode des petits pas (connue aussi sous le nom de méthode Kaizen) est de diviser un objectif qui peut sembler inatteignable, tel que retrouver une activité, en petites étapes facilement réalisables. Arriver rapidement à de petites victoires à savourer encourage à poursuivre dans la bonne direction.



Le premier mois, j'ai douté de la pertinence de cette approche car ce fut laborieux : les participant.es ne savaient pas quoi dire ou se fixaient un pas trop important. Mais nous avons fait confiance au processus. Et force est de constater que cette méthode est si puissante qu'elle n'a de "petit" que le nom. Comme en témoigne aujourd'hui une de nos participantes : "Les petits pas, ça m'apporte de nouvelles idées des autres. Cela permet d'aller au delà de ce qu'on aurait imaginé et de prouver qu'on est capable de faire les choses".


Et ce constat, j'ai pu le faire dans d'autres contextes de facilitation. Que ce soit dans les ateliers de créativité menés pour Enactus auprès de jeunes en lycée pour leur faire imaginer leur projet ESS... ou encore dans les ateliers de sensibilisation au changement climatique animés pour l'association La Fresque du Climat... à chaque fois que j'ai fait preuve d'une confiance sans faille dans le processus, de petits miracles se sont toujours produits, en dépit de débuts parfois chaotiques. Et à l'inverse, à chaque fois que j'ai douté, telle une prophétie auto-réalisatrice, je ne suis pas ressortie satisfaite de mes ateliers, comme si j'avais distillé mes incertitudes au groupe.


2ème apprentissage : Créer le cadre qui redonne le pouvoir d'agir mais lâcher-prise quant à l'impact



En tant que facilitatrices, notre rôle à ma binôme et moi était avant tout d'être garantes de notre cadre d'intervention. C'est ce qui a permis aux membres de notre groupe de se saisir de l'intelligence collective pour avancer ensemble dans leurs objectifs respectifs et progresser sur les 5 C.


Or, quand nous faisons de l'accompagnement de personnes en recherche d'activité, mais aussi en transition écologique, il peut être tentant de vouloir les aider individuellement, voire de faire les choses à leur place.


S'aventurer sur ce terrain revient à sortir du cadre de l'accompagnement collectif pour endosser un rôle de "sauveur", tentant mais malvenu. Or, ce n'est pas en agissant de la sorte que nous aidons réellement les gens. Au contraire, nous les confortons dans un rôle de "victime" et ne leur redonnons pas leur pouvoir d'agir. Aucun changement durable ne peut en ressortir.


En voulant respecter le cadre, il convient de veiller à ne pas non plus adopter une approche trop rigide. J'ai appris grâce à une participante que parfois, certaines priorités pouvaient évoluer et qu'en tant qu'accompagnatrice, mon rôle était non pas de le challenger, mais de l'accepter et m'adapter. Dans ce cas précis, j'étais passé à côté d'un frein non négligeable, l'instabilité financière, qui exigeait d'elle de mettre temporairement de côté le projet dont elle nous parlait depuis la première séance. Mon enthousiasme pour son projet a dépassé ce qu'elle était en mesure d'accomplir à ce moment du parcours. Cela m'a amené à endosser le rôle de "persécuteur", en lui mettant une pression maladroite qui la poussait à agir mais pas là où elle en avait besoin. Il est donc crucial de ne pas déconnecter le cadre des besoins des membres du groupe pour ne pas perdre l'adhésion.


Pour aller plus loin sur ce sujet, je vous invite à explorer le triangle dramatique de Karpman sur les rôles que je viens de vous décrire.




Revoir ma posture m'a aidée à prendre du recul quant à l'impact de mes ateliers sur les gens. Il est important d'avoir à l'esprit que nous croisons les personnes à un moment de leur vie ou de leur parcours qui fait qu'elles sont en mesure de se saisir de ce que nous leur apportons ou pas. Quand elles le font, c'est bien sûr fantastique, comme j'ai pu le constater avec 3 des personnes que nous avons accompagnées qui se sont remises en activité.


Mais quand les personnes ne se saisissent pas ou pas immédiatement de ce que nous leur apportons, je me dis maintenant que nous plantons des graines. Pour certaines, elles continueront à les arroser régulièrement pour qu’elles grandissent jusqu’à devenir de belles fleurs. Pour d’autres, elles écloreront beaucoup plus tard avec l’aide d’autres jardinier·ères... ou peut-être jamais car la personne a choisi de ne pas se saisir de ce que nous avions à offrir. Et il est important d’être en paix avec cela pour ne pas s’épuiser quand on travaille sur des projets à impact positif.


3ème apprentissage : Savoir renvoyer vers le groupe



Quand on facilite des ateliers, il est fréquent de croire que l'intégralité de ce qu'il s'y passe repose sur soi et de se mettre une pression énorme. Or, si nous sommes là comme je le disais pour garantir le respect du cadre, sur le reste il est souvent judicieux de savoir renvoyer au groupe.


Nous avons pu le constater dans le cadre d'App'ee lorsque nous avons eu des personnes qui étaient absentes durant des séances ou commençaient à décrocher. Nous avons rapidement proposé à un.e membre du groupe d'appeler la personne absente pour lui faire un résumé de la séance ou essayer de la remotiver. Et cela s'est avéré beaucoup plus efficace que si nous l'avions fait nous même. Cela a consolidé les liens entre les gens, tout en valorisant la personne volontaire.


Personnellement, cela m'a beaucoup aidée dans les ateliers de la Fresque du Climat qu'initialement, j'animais en pensant devoir être une experte du GIEC, donc avec un gros syndrome de l'imposteur. J'intervenais également souvent pour donner mon avis lors des débats animés autour des pistes de solutions. Or, en parlant moins, en écoutant plus, en posant des question, en me mettant en recul pour laisser l'intelligence collective opérer, j'ai gagné à la fois en sérénité et en impact.


Et la suite ?

Vous l'aurez compris, j'ai beaucoup appris sur la facilitation cette dernière année. Et même si nous sommes arrivées à la fin du parcours avec notre groupe, je ne doute pas que l'expérience App'ee continuera à me servir énormément. J'y ai notamment vu un tel potentiel pour mettre les personnes en action que j'aimerais pouvoir déployer le dispositif au service de l'insertion dans les métiers de la transition écologique.


Quant aux membres de notre groupe, un beau chemin semble leur être tracé. Je vous livre en guise de conclusion quelques verbatims collectés auprès des 4 personnes qui sont restées jusqu'au bout du dispositif.


"Je me suis découverte. J'ai compris que je pouvais faire plein de choses et que j'avais la capacité de les faire si je m'en donnais les moyens. Il suffit d'avoir la volonté. (...) J'ai compris que je pouvais être intéressante. J'ai repris confiance en moi et dans le futur".


"C'est un groupe de progression et de partage qui fait du bien. Cela m'aide à ne pas rester dans la léthargie".


"Je suis plus claire sur mes compétences et comment les utiliser".


"Je suis en train de redevenir moi-même, celle que j'étais, et de reprendre ma vraie nature"


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